Cette phiale est entière et en bon état, malgré quelques petites indentations sur les côtés et à la base. Sa forme est simple : le fond est plat, la paroi sélève à la verticale, puis sévase légèrement au sommet, avant de se replier sur ellemême pour former une bordure renflée. Une protubérance centrale dépasse du fond d’environ 2 mm; son sommet est aplati. La phiale est faite d’une unique plaque d’or, très probablement martelée puis polie au tour.Les phiales sont des coupes peu profondes utilisées dans tout le monde hellénistique pour boire ou pour effectuer les libations. Ces fonctions sont amplement attestées par les sources antiques et par leurs innombrables représentations dans l’art grec, où le récipient est montré dans les mains des dieux, des hommes ou des femmes. La libation était la forme de sacrifice la plus répandue dans le monde antique. Elle pouvait nécessiter deux récipients : la cruche contenant le vin et la coupe à libations, ou phiale. Le vin était versé de la cruche dans la coupe, qui était ensuite renversée pour permettre au liquide de s’infiltrer dans le sol.Les écrits démontrent que les phiales, surtout en or, étaient aussi employées comme cadeaux diplomatiques. La forme du récipient trouve son origine dans les temps post-homériques ; le mot apparaît sur un plat en argent chypriote du VIe siècle. Les références à ce terme sont nombreuses dans la littérature antique et se retrouvent souvent dans les inventaires de temple.De tels objets ont été découverts dans tout le monde ancien, fabriqués dans toutes sortes de matières, parmi lesquelles lonyx, la terre cuite, le verre, le bronze, l’étain, l’argent et l’or. La phiale ressemble aux calyx cups à omphalos, coupes plus profondes qui auraient pu en inspirer la forme. Cette phiale a été découverte prise sous des blocs de maçonnerie d’un bâtiment identifié comme un temple de style pharaonique. Il est tentant d’en conclure quelle a été utilisée dans le déroulement des rituels ou comme offrande. Les phiales grecques sont en général plus petites que celle de Thônis-Héracléion, mesurant en moyenne 10 à 13 cm de diamètre, ce qui permet de tenir l’objet d’une seule main.Parfois, on trouve des exemplaires de dimensions supérieures, conçus peut-être pour être exposés et évoquer les libations. Il est difficile de dire si la phiale de Thônis-Héracléion doit être incluse dans cette catégorie. Cependant, la faible épaisseur de la plaque d’or encourage cette interprétation. La protubérance centrale ne semble guère plus qu’une esquisse d’omphalos. Traditionnellement, l’omphalos permettait de mieux tenir l’objet, en y introduisant le bout du majeur et de l’annulaire, tandis que l’index et l’auriculaire s’étiraient sous le fond et que le pouce s’accrochait au bord. Cette façon de présenter l’objet apparaît dans la statuaire, sur les bas-reliefs et les peintures de céramiques. Les coupes thraces et perses possèdent souvent un omphalos réduit. Dans ces régions, il semble avoir eu moins d’importance, puisque l’objet était simplement tenu entre le pouce et les quatre autres doigts. La petite protubérance de cette phiale trahit peut-être l’influence achéménide sur le travail du métal en Égypte.Zoe Cox, dans Trésors engloutis d’Égypte, Paris, 2006 p. 155, avec bibliographie